Le gouvernement Nétanyahou ordonne la fermeture d'Al-Jazeera en Israël

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Ce dimanche 5 mai, "le gouvernement israélien a voté à l'unanimité la fermeture de la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera en Israël, en raison de sa couverture de la guerre à Gaza", relaie le quotidien israélien Ha'Aretz.

L'exécutif a donné le feu vert à Shlomo Karhi, ministre de la Communication, pour interrompre la diffusion du média en Israël - en anglais comme en arabe -, pour "fermer ses locaux" dans le pays, mais aussi pour "confisquer le matériel utilisé par son personnel, à l'exception des téléphones et des ordinateurs", et "limiter l'accès à son site Internet sur le territoire israélien". Selon le Shin Bet, service de sécurité intérieure israélien, la couverture par la chaîne de la guerre à Gaza "nuit à la sécurité de l'État", rapporte Ha'Aretz.

Début avril, le Parlement israélien avait voté une loi permettant d'interdire la diffusion en Israël de médias étrangers portant atteinte à la sécurité de l'État - un texte qui visait la chaîne qatarie. Ce dimanche, Shlomo Karhi s'est félicité de cette décision sur X, affirmant : "Après une trop longue attente et de trop nombreux obstacles juridiques, nous avons enfin pu mettre un terme à la machine d'incitation [à la haine] bien huilée de la chaîne, qui nuit à la sécurité du pays."

Le média dénonce une décision "dangereuse"

Le directeur du bureau d'Al-Jazeera en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés, Walid Al-Omari, a dénoncé une décision "dangereuse et politique", qui "intervient après une campagne […] des ministres d'extrême droite" du gouvernement israélien. Il a précisé que le service juridique de la chaîne "préparait une réponse à cette fermeture".

L'animosité d'Israël à l'égard de la chaîne qatarie ne date pas d'hier : le gouvernement israélien avait déjà tenté à plusieurs reprises de faire interdire le diffuseur ces dernières années.

Début avril, le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a décrit le média comme "un organe de propagande du Hamas" qui aurait "participé activement" à l'attaque terroriste menée le 7 octobre par l'organisation dans le sud d'Israël. Des accusations niées par la chaîne, qui accuse quant à elle le gouvernement israélien de cibler systématiquement ses employés dans la bande de Gaza. Au moins deux journalistes d'Al-Jazeera y ont été tués depuis le début de la guerre, et son chef de bureau à Gaza a été blessé.

Al-Jazeera était "l'un des rares médias internationaux à rester à Gaza depuis le début de la guerre, diffusant des scènes sanglantes d'attaques aériennes et d'hôpitaux surchargés, et accusant Israël de massacres", rappelle la principale intéressée sur son site Internet.

Cette décision, commente la chaîne, vient "aggraver la querelle de longue date" avec le gouvernement israélien et "menace d'envenimer les tensions avec le Qatar, qui finance le diffuseur, au moment où Doha joue un rôle clé dans les efforts de médiation en faveur d'une trêve à Gaza".

Un moment choisi à dessein

Ce timing, justement, interroge jusque dans les rangs du gouvernement israélien. "Les ministres issus du Parti de l'unité nationale [centriste], dirigé par Benny Gantz, étaient absents lors du vote", indique Ha'Aretz, et bien qu'ils aient affirmé soutenir la fermeture de la chaîne, ils jugent le timing "malheureux" et estiment que la décision "pourrait saboter les négociations sur la libération des otages avec le Hamas".

Une source diplomatique a confié à Ha'Aretz que "la décision d'accélérer sur ce sujet au moment où des négociations sur une trêve ont lieu à Doha n'est pas une coïncidence" :

"Il est clair que cela vise à mettre le Qatar sous pression. La loi et l'interruption des activités d'Al-Jazeera en Israël sont un autre outil qu'Israël peut utiliser pour accroître la pression sur le Qatar, afin que celui-ci utilise son influence sur le Hamas pour obtenir de l'organisation qu'elle modère ses positions."

Depuis Ramallah, en Cisjordanie, le reporter d'Al-Jazeera Zein Basravi a réagi à cette annonce en affirmant que la guerre entre Israël et la Palestine était "l'une des principales raisons pour lesquelles notre chaîne existe". Et le journaliste d'ajouter : "Le fait que nous, journalistes, nos activités, soyons menacés de cette manière… Cela nous fait craindre, assurément, d'être les prochains à subir le même sort en Cisjordanie occupée."