Liaisons dangereuses : lèpre, écureuils roux et humains dans l'Angleterre médiévale

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L'Angleterre médiévale adorait les écureuils roux, prisés pour leur compagnie mais aussi pour leur fourrure. Au point que la lèpre a pu faire le "ping-pong" entre les petits rongeurs arboricoles et les humains.

Publié le 06 mai 2024 à 17h43 Lecture 1 min.

Les écureuils roux ("Sciurus vulgaris") sont porteurs du bacille de la lèpre. Il semblerait qu'au Moyen Âge les humains et les écureuils se soient infectés les uns les autres. photo Leemage/AFP

Maladie multimillénaire pourvoyeuse de handicaps, la lèpre se transmet principalement par contact prolongé entre êtres humains. Mais pas seulement. À côté des chimpanzés sauvages et des tatous, les écureuils roux (Sciurus vulgaris) des îles Britanniques peuvent aussi être porteurs de Mycobacterium leprae, le bacille de la lèpre. C'est ce qu'avaient découvert des scientifiques en 2016.

D'autres chercheurs viennent de montrer, "après avoir analysé des os d'écureuils datant de l'Angleterre médiévale, que ces petites créatures poilues étaient porteuses d'une souche de la bactérie responsable de la lèpre tout à fait similaire à celle qui circulait dans la population il y a plusieurs siècles", rapporte Science dans un article grand public. Preuve que la maladie "aurait fait des allers-retours entre les humains et les écureuils". Explications.

Ossements

Il n'est pas exagéré de dire que l'Angleterre médiévale adorait les écureuils roux. Cet amour pouvait prendre des formes très diverses puisque "les gens gardaient les rongeurs arboricoles comme animaux de compagnie et utilisaient leur fourrure pour leurs vêtements", explique le magazine scientifique.

L'équipe de Sarah Inskip, ostéoarchéologue à l'université de Leicester, au Royaume-Uni, a mené ses investigations à Winchester, "une ville médiévale anglaise bien connue pour sa léproserie et ses liens avec le commerce des fourrures", expliquent les auteurs dans leur article publié dans Current Biology. L'étude a porté sur les ossements de vingt-cinq personnes et de douze écureuils provenant de deux sites archéologiques de Winchester. Une fois les os broyés, du matériel génétique en a été extrait : de l'ADN d'être humain et d'écureuil mais aussi du bacille de la lèpre. Et c'est, d'après Science, la première fois que "le génome d'une souche de M. leprae était reconstitué à partir de restes archéologiques d'un animal non humain".

La partie la plus intéressante de ce travail a été la comparaison entre les souches des bacilles des écureuils et les souches humaines. La souche des bacilles des écureuils médiévaux est en effet plus proche génétiquement de celle trouvée sur le site situé à proximité de la léproserie que des bacilles affectant les écureuils roux modernes. D'après Sarah Inskip, "cela indique que la lèpre circulait entre les écureuils et les humains en Angleterre au Moyen Âge, peut-être en 'ping-pong' entre les deux", rapporte Science.

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