« La France n'a pas voulu de nous » : les musulmans diplômés, victimes de discriminations, s'expatrient

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Au bout de soixante-dix curriculum vitæ sans aucune réponse, pas même une convocation pour un entretien, Abdel* a compris. Prénom arabe, nom d'Afrique subsaharienne, la peau noire bien visible sur ses photos, musulman : « Je cumulais les handicaps », grince-t-il amèrement. Les sociétés bancaires auprès desquelles il postulait ont préféré embaucher ses camarades de promo, « blancs, cathos ou athées ». Alors, « à regret », à 26 ans, Abdel a tenté sa chance au Luxembourg. « J'ai envoyé trois CV… j'ai eu trois entretiens concluants », sourit ce sportif, ancien élève d'une école de commerce, aujourd'hui directeur financier d'une entreprise du Grand-Duché.

Comme lui, ils sont « des dizaines de milliers » de Français de confession musulmane à quitter la France, victimes de discriminations ou fuyant un climat qu'ils jugent hostile à l'islam. C'est ce que met en lumière le livre-enquête « La France, tu l'aimes mais tu la quittes », publié aux Éditions du Seuil, ce vendredi 26 avril, coécrit par Julien Talpin, Olivier Esteves et Alice Picard. Le premier est chargé de recherches au CNRS, le second professeur à l'université de Lille, spécialiste de l'islam, et la dernière, chercheuse en sciences économiques et sociales.