Présidentielle américaine : Donald Trump, coincé à New York pour son procès, continue de collecter des millions

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L'élection présidentielle américaine se déroulera dans six mois et le premier procès pénal ouvert contre l'ancien président Donald Trump entre ce lundi dans sa quatrième semaine et son 12e jour d'audiences. Le candidat à un nouveau mandat à la Maison Blanche fait face à la justice de New York pour avoir contourné les lois commerciales régissant son empire immobilier, de façon à dissimuler le pot-de-vin versé à l'actrice et productrice de films X Stormy Daniels pour taire une ancienne relation adultère qui aurait écorné l'image du magnat.

Depuis l'ouverture du procès, les procureurs ne révèlent pas à l'avance le nom des personnes qu'ils appelleront à témoigner. On ignore donc quand Stéphanie Clifford - le vrai nom de Stormy Daniels - se présentera à la barre, de même que l'avocat Michael Cohen, qui avait fait le versement de 130 000 dollars sur ses deniers personnels avant d'être remboursé par la Trump Organization. Âme damnée de Trump pendant des années, qui l'appelait « mon pitbull », avocat personnel et ami, Cohen a accepté de collaborer avec la justice pour s'éviter de trop lourdes poursuites, et allégé sa peine de prison pour fraude fiscale. Les deux hommes ont rompu tout lien. Cohen a déjà témoigné contre Trump en justice à l'automne, sur la falsification des comptes de son entreprise. Son interrogatoire devrait soulever la colère de Trump, qui peine à respecter son injonction au silence.

Car le juge de la Cour suprême de New York (*) Juan Merchan, qui supervise le procès à Manhattan, a contraint le prévenu à se taire pendant les interrogatoires et les contre-interrogatoires. Mais l'éruptif Trump sort parfois de sa posture ensommeillée - dont on ne peut dire si elle est authentique ou surjouée - et a violé à plusieurs reprises l'ordonnance. Mardi et jeudi derniers, le juge Merchan a tenu deux audiences parallèles sur des violations récentes présumées, soit en salle d'audience, soit dans ses posts sur son réseau Truth Social ou dans ses documents de campagne. Le prévenu a déjà réglé 9 000 dollars d'amende, pour neuf infractions au silence, mais le juge Merchan a aussi prévenu les avocats du magnat qu'il pourrait aller en prison s'il continuait à enfreindre les règles du tribunal.

Vendredi il a rappelé à Donald Trump que cette injonction ne le réduisait pas au silence, comme il le prétend en meeting. « L'ordonnance restreignant les déclarations extrajudiciaires ne vous empêche en aucun cas de témoigner, elle ne vous interdit pas de prendre la parole et ne limite ni ne minimise ce que vous pouvez dire », lui a-t-il rappelé.

Trump accuse Biden de diriger « l'administration de la Gestapo »

Le magistrat a aussi prévenu Cohen et Daniels qu'il pourrait leur appliquer la même ordonnance s'ils continuaient à critiquer publiquement Trump, lors d'interviews notamment.

La semaine dernière s'est achevée par le témoignage de Hope Hicks, attachée de presse du candidat pendant la campagne de 2016 puis directrice de sa communication à la Maison Blanche jusqu'en février 2018. Contrainte à se présenter devant le tribunal par une injonction à comparaître, l'ancienne proche collaboratrice a montré par ses réponses combien Trump craignait que de vieilles histoires concernant les femmes ne fâchent sa femme Melania et ne dissuadent les électrices républicaines de voter pour lui.

Elle a notamment évoqué l'affaire de l'enregistrement d'« Access Hollywood » révélé en 2016 mais datant de 2005, au cours de laquelle Trump plastronnait auprès d'un présentateur de télévision sur ses tentatives de séduire des femmes mariées, de les embrasser, affirmant : « Je n'attends même pas (leur accord, NDLR). Quand tu es une star, elles te laissent faire. Tu peux tout faire, les attraper par la chatte… Tu peux tout faire ». Selon Hicks, lorsque l'enregistrement avait été authentifié, le candidat Trump semblait surpris qu'on s'étonne d'une conversation typique entre deux hommes ensemble.

S'il est obligé de rester à New York quatre jours par semaine, lui qui alterne d'ordinaire entre son complexe de Mar-a-Lago (Floride) et des meetings dans tout le pays, le candidat Trump en profite pour faire des apparitions dans sa ville d'origine, pourtant profondément démocrate. Ainsi jeudi après le procès, s'est-il rendu dans une caserne de pompiers du centre de Manhattan, avec des boîtes de pizza. Il y a passé un bref moment, a serré des mains, posé pour des photos, avant de retourner à la Trump Tower pour la nuit. Quelques jours plus tôt, il était allé à la rencontre d'ouvriers sur le chantier d'un gratte-ciel - sans lien avec son entreprise - et dans un quartier à majorité hispanique de Harlem. La presse, qui ne peut pas filmer les audiences au tribunal, couvre en masse chacun de ces microdéplacements, qui deviennent alors comme des cartes postales de campagne, envoyées aux quatre coins du pays, à défaut de s'y rendre.

Jeudi soir après son procès, Donald Trump s'est rendu dans une caserne de pompiers de Manhattan, où le chef de bataillon Mark Rosenbaum lui a remis une casquette. AFP/Getty/Michael M. Santiago 2024 Getty Images

Preuve que le procès ne ternit pas l'image de Donald Trump auprès de ses partisans, son directeur de campagne Chris LaCivita et le Comité national républicain ont annoncé samedi avoir collecté plus de 76 millions de dollars en avril, dix millions de mieux que les 65,6 millions de dollars levés en mars. « Avec la moitié des fonds collectés provenant de petits donateurs, il est clair que notre base est dynamisée. Le Parti républicain est uni et les électeurs de tout le pays sont prêts à licencier Joe Biden et à élire Donald J. Trump », se sont-ils réjouis. La campagne de réélection du démocrate Joe Biden a régulièrement dépassé celle de Donald Trump en matière de collecte de fonds mais l'écart tend à se réduire.

En privé, le candidat républicain continue d'accuser les démocrates et les médias américains d'un complot pour empêcher sa réélection. Samedi, lors d'un événement privé réunissant des donateurs en Floride, il a même accusé la Maison Blanche et le président Biden d'être nazis. « Ces gens dirigent une administration de la Gestapo », a-t-il accusé, selon un enregistrement audio entendu par le New York Times et le Washington Post. « Et c'est la seule chose qu'ils ont. Et c'est la seule façon pour eux de gagner », a-t-il reproché.

(*) Contrairement à la Cour suprême des États-Unis, la plus haute juridiction et l'ultime recours pour trancher des litiges, la Cour suprême de l'État de New York est un tribunal de première instance. Elle est dotée de la plus grande compétence en matière pénale et civile dans l'État, et toutes les affaires importantes sont tranchées par les juges qui y siègent. Ses décisions sont passibles d'appel.